POIL DE CAROTTE

Publié le par LAURENCE NOYER

POIL DE CAROTTE

Poil de Carotte, Paris, Flammarion, 1894, 276 p.


En 1902 Renard a donné une édition de 326 pages, qui comprend cinq récits en plus, et qui forme l’édition définitive. Calmann-Lévy a publié en 1907 une édition à 0,95 f. (avec les illustrations de Poulbot, qui fut très largement diffusée avant 1940). Flammarion lance en 1915 une édition populaire (Select Collection) à 0,50 c. : Léon Guichard calcule que ces deux éditions populaires formaient un tirage de 315 000 exemplaires, ce qui est considérable à cette date.
Le manuscrit avait été donné à Sacha Guitry, il se trouve depuis 1978 aux Archives départementales de la Nièvre : or il permet d’ajouter à Poil de Carottedes Notes retrouvées et de donner des variantes signi- ficatives de la manière de travailler de Renard (nous avons publié ces Notes retrouvées dans lesMémoires de la Société Académique du Nivernais, 1979, p. 79-85).
Léon Guichard en 1970 avait donné une édition annotée avec soin de Poil deCarotte, dans les Œuvres,
Bibliothèque de la Pléiade (t. I, p. 635-771 et notes, p. 1002-1024) ; on trouve :
— un « Avertissement » p. 635-646 :
— la description du manuscrit de Sacha Guitry (celui des Archives de la Nièvre : L. Guichard n’a pu l’exploiter, il a publié seulement dans sa thèse précitée, p. 110-12 La pelote de laine qui n’appartenait pas à Poil de Carotte) ;
— la liste détaillée des pré-publications (p. 651-652) ;
— l’état des éditions depuis 1894 (p. 653-654) ;
— des extraits d’articles publiés à la sortie du livre (p. 654-658) ;
— le texte avec des notes (p. 1002-1024) donnant des variantes.
C’est encore un bon outil de travail, l’Avertissement est une introduction nécessaire à la lecture de Poil de Carotte.

Mais Pierre Brunel, en donnant en 1988 une édition à l’Imprimerie nationale dePoil de Carotte, a pu utiliser le manuscrit des Archives de la Nièvre et donner des textes inédits : c’est cette édition qui doit servir de référence aujourd’hui, en attendant une édition critique du manuscrit.
Poil de Carotte, contrairement à ce que l’on croit, n’est pas facile à comprendre : il est trop simple de croire que Renard ait voulu se venger de sa mère (même s’il écrit : « Il faut au moins que je profite un peu du désir de me venger », manuscrit Doucet, cité par Guichard, Œuvres, t. I, p. 636, n. 5) : ses relations avec sa mère étaient très complexes ; le Dr Rolland a pu écrire une thèse sur Lecomplexe d’Œdipe chez Jules Renard, et le Journal contient quelques traces des rêveries incestueuses de Renard enfant, à la date du 18 octobre 1896 (Poil de Carotte secret, Journal, p. 347-348 : «... Ce feu est resté dans mes veines. Le jour il dort, mais la nuit il s’éveille et j’ai des rêveries effroyables. En présence de M. Lepic qui lit son journal et ne nous regarde même pas, je prends ma mère qui s’offre et je rentre dans ce sein d’où je suis sorti. Ma tête disparaît dans sa bouche. C’est une jouissance infernale... » (on aimerait savoir si Bachelin a retouché ce texte). Et dans les Notes retrouvées du manuscrit de Nevers on trouve la note :
« La nuit il rêve qu’il étrangle, qu’il écrabouille sa mère ». Mais ce sont là des textes à interpréter prudemment, car on ne sait pas tout du ménage Renard, des raisons de la brouille du père et de la mère (il lui aurait offert le divorce qu’elle refusa et certaines pages des Cloportes (notamment le chapitre XX de la première partie, Œuvres, t. I, p. 127-130), composées en principe en 1887-1888, devraient bien intéresser les médecins).
Il est toujours délicat d’écrire sur Poil de Carotte : on a quelques pages de Léon Guichard dans l’édition précitée des œuvres, de Michel Autrand dans L’humour deJules Renard, 1978, p. 179-206, de Fermigier en tête de l’édition Folio de Gallimard (1977) et de Pierre Brunel dans son édition de 1988 ; toute opinion trop tranchée est dangereuse, on risque d’égarer ses lecteurs. Mais les contemporains ont bien vu dès le départ, ainsi un Léon Daudet, que Poil de Carotte allait devenir un classique.

(source: jules-renard.nevers.fr)

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