TREFOUEL

Publié le par LAURENCE NOYER

TREFOUEL

Jules Renard vu par Jacques Tréfouël. Jacques Tréfouël a réalisé, depuis 1978, trois documentaires sur Jules Renard. L’homme et son œuvre, il le confie, l’émeuvent.

« Nous avons un point commun, tous les deux : nous sommes presque nés dans la Nièvre. » Tout est dans le « presque ». L’histoire a voulu, en effet, que Jules Renard et Jacques Tréfouël naissent en dehors du sol nivernais. Pour y revenir. Et le second s’amuse de la coïncidence. On pourrait en sourire, oui. Mais derrière ces mots se cache une réalité : ce qui lie les deux hommes n’a rien de léger ou d’anecdotique. Parce qu’on touche aux racines et à une certaine manière de regarder le territoire.

Gosse, Jacques Tréfouël ne croise pas l’œuvre de Jules Renard. Pas le souvenir, en tout cas. Quand il la rencontre, un peu plus tard, c’est par un intermédiaire. « Avant de lire ses œuvres, j’ai acheté un livre de la collection des “Écrivains de toujours”, aux éditions du Seuil. Il y avait des photos de lui, de Chitry-les-Mines, de la campagne nivernaise. » Cette campagne, Jacques Tréfouël la connaît. C’est un peu la sienne.

Le paysage fait lien, donc. Mais il y a davantage. C’est bien le choix de Jules Renard de s’y inscrire dans la durée, d’ancrer sa vie là, qui marque Jacques Tréfouël.

« Ce qui me touche chez lui, c’est que cet homme qui aurait pu être un grand boulevardier, à la magnifique intelligence, aux amitiés parisiennes, revienne d’abord de temps en temps dans la Nièvre avant de s’y installer. L’idée de retour, c’est une notion qui m’interroge et qui m’émeut. Je trouve l’installation de Romain Rolland à Vézelay, à la fin de sa vie, très touchante également. »

Rien d’anodin, donc, dans le choix du réalisateur de consacrer le premier de ses documentaires consacré à l’auteur de Poil de Carotte aux feuillets nivernais de son Journal. Journal auquel, il le confie, il est particulièrement attaché. « Le Journal, c’est une fête pour l’intelligence. Il m’émerveille, car on y trouve des images et une écriture superbes, et il me fait poser un regard un peu grave sur la vie. » Le Journal lui ouvre aussi des portes. Celles des œuvres d’Alphonse Allais et de Tristan Bernard notamment. « En les évoquant dans son Journal, Jules Renard me les a fait mieux connaître. Il a été une entrée à cette littérature fin de siècle où l’intelligence pétille. »

C’est la réalisation d’un autre documentaire, avec Daniel Hénard, dans le cadre de la commémoration du centenaire de la disparition de l’auteur, qui lui fait toucher du doigt une autre dimension de Jules Renard : le républicain, le défenseur de Dreyfus, l’ami de Jaurès. « Le troisième documentaire, c’était l’occasion de montrer l’homme préoccupé par les problèmes de son temps, en lutte contre l’illettrisme, et soutenant de manière indéfectible l’école de la République. »

Ce Jules Renard-là le séduit, forcément. Mais le lien est plus fort que la simple admiration. « Jules Renard est un compagnon. À certains moments de ma vie, il a été à mes côtés. »

Publié dans portraits

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