ESTAUNIE

Publié le par LAURENCE NOYER

Edouard Estaunié : Le Mémorial Diplomatique, 11 mars 1900 « Poil de Carotte » (théâtre) «Vous entendez bien, au seul énoncé de ces noms, qu’en tout état de cause, la soirée fut une fête littéraire ; et de fait, la prose qui nous fut servie est une prose à la fois nette et ciselée à laquelle les auteurs dramatiques nous ont rarement habitués. En revanche, les sujets traités m’ont paru tenir plus du roman que du drame…Poil de Carotte est également un sujet de roman, bien qu’il parût tut d’abord sous cette forme. On y expose les avanies subies dans la vie ordinaire par un enfant que sa mère n’aime pas. Il est clair que ces avanies – toutes choisies avec un art raffiné – ne peuvent survenir d’affilée et que Mme Lepic – si industrieuse soit elle – n’arrive pas à torturer l’âme inquiète de son fils d’une manière parfaitement continue. Logiquement, Poil de Carotte (je parle du roman) devait donc comporter une série de tableaux, ou de nouvelles agencées de telle sorte que le lecteur ait la sensation du temps. M. Jules Renard, un amoureux des petites choses et qui se soucie médiocrement des longs développements psychologiques a en effet, composé son livre d’une manière volontairement décousue ; on croirait, à la lire, suivre une séance de cinématographie. Quand on y réfléchit, l’invraisemblance est criante. Mais Jules Renard s’est contenté d’un acte. La netteté du détail, le fini extrême des parties composant cet acte ont fait passer condamnation sur cette invraisemblance. La pièce a causé un extrême plaisir, parce qu’elle est courte. Réduite encore un peu, allégée de certains détails très justes dans le livre, mais excessifs à la scène, elle restera, sans doute. »

Publié dans poil de carotte

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