CHARLES

Publié le par LAURENCE NOYER

Ernest Charles: Gil Blas, 2 novembre1907, A l'occasion de l'élection de Jules Renard à l'Académie Goncourt, le 31 octobre « Les élections académiques sont toujours utiles à quelqu'un. Le plus souvent, elles le sont à celui qui est élu. Parfois, elles le sont même à ceux qui échouent. Croyez-vous que Jules Renard soit le littérateur qui tire le plus grand avantage de son élection à l'académie Goncourt ? Il était hier connu et admiré d'une élite. Demain il sera comme hier connu et admiré d'une élite. Qu'y gagne-t-il ? Trois mille francs l Cela n'est pas méprisable ; mais c'est à peu près tout ce qu'il y gagne. Au surplus, je suis enchanté de le féliciter de son élection. Mais quel est le grand vainqueur de ces scrutins compliqués et véritablement inénarrables ? C'est assurément Henry Céard. Henry Céard est un écrivain qui n'est plus un tout petit jeune homme. Il a débuté naguère, jadis, autrefois. Les années passent vite en littérature, et pourtant elles comptent double. Il avait fait une pièce estimée et puis un livre ignoré. Et, depuis ce temps-là, rien, plus rien. Il semblait avoir privé la littérature de son concours. Et subitement, cette année-ci, il a publié un livre auquel personne n'a pris garde — et tout le monde a eu tort de n'y pas prendre garde. Ce livre était affublé d'un titre bizarre : Terrains à vendre au bord de la mer. Henry Céard revenait-il décidément ou ne revenait-il pas décidément aux lettres, aux belles lettres, aux bonnes lettres ? On ne se le demandait même pas. On restait prodigieusement indifférent. Le hasard d'une candidature à l'Académie d'à côté le jette soudain dans la notoriété, presque dans la gloire. On ne sait pas bien ce que c'est qu'Henry Céard ; mais on sait qu'il existe ! Enfin ! allez donc prétendre que les élections académiques n'ont pas leur raison d'être. »

Publié dans Goncourt

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